Créées par le décret et l’arrêté du 2 avril 2009 avec instruction du 23 juin 2016, les unités d’enseignement externalisées (UEE) ont pour but de diversifier l’offre de scolarisation, d’augmenter le nombre d’heures de scolarisation, d’affirmer la mise en œuvre d’un enseignement adapté, de préciser la coopération entre Education nationale et secteur médico-social. L’externalisation s’entend donc, du point de vue médico-social, comme une possibilité d’enseignement en dehors du lieu d’affectation. Elle correspond à un retour effectif de l’enfant concerné vers l’école, le collège ou le lycée. Ces UEE ont en effet vocation à offrir à des élèves préalablement accueillis en établissements médico-social, des conditions d’accueil dans les entités scolaires en écoles ou en établissements scolaires avec un accompagnement médico-social (éducatif, pédagogique et thérapeutique) du premier et second degré à disposition. Cet appui prend en compte les interactions avec l’environnement familial, scolaire et social.
Du point de vue des effectifs, le nombre d’enfants accueillis est souvent compris entre 6 et 8 élèves par unité, cette limitation prenant en considération leurs besoins. Il est à noter qu’il n’existe pas d’effectifs maximum, le nombre choisi étant fixé par la structure médico-sociale.
De la diversité dans les élèves comme dans les professionnels
Les équipes présentes au sein de ces unités sont composées d’un enseignant spécialisé et d’un personnel relevant du secteur médico-social qui peut être un éducateur spécialisé. L’objectif recherché est de proposer des modalités d’accompagnement diversifiées, modulables et évolutives par des personnels issus du secteur médico-social et de l’Education nationale (personnels enseignants mis à la disposition des établissements spécialisés dans le cadre d’une convention de coopération). La notion d’inter-métiers entre professionnels ayant des « historiques professionnels » différents est donc éminemment importante de manière à ce que chacun puisse comprendre les attendus de métiers de chaque acteur et envisage une coopération efficiente au service des enfants et adolescents.
Un levier proposé par la mise en place des unités d’enseignement externalisé : le vivre ensemble
L’UEE met l’enfant ou l’adolescent dans une situation de vie commune avec l’ensemble de ses pairs au sein d’une structure scolaire dite ordinaire. Cela amène à le positionner en tant que nouvel élève de l’entité scolaire (1er ou 2nd degré) participant à la vie commune. Ce fait, s’il est institué dans le temps, en considérant les élèves comme faisant partie d’un tout, favorise ce que l’on appelle le « vivre ensemble » visant une meilleure adaptation sociale.
Cette vie commune rassure les familles dans le sentiment d’appartenance à la communauté éducative. En effet, nombre d’entre elles gardent à l’esprit que la scolarisation en établissements est une scolarisation par défaut. La mise en place de l’externalisation des unités d’enseignement ouvre la porte des possibles, envisage ce retour attendu à l’Ecole comme la fin d’une « mise à côté ».
La vie commune aide enfin les professionnels éducatifs, pédagogiques et thérapeutiques des différentes institutions à trouver la place qui leur revient en croisant les aides apportées par chacun, personnels relevant du secteur médico-social comme de celui de l’Education nationale.
Un obstacle que l’on peut rencontrer : des « vies parallèles »
On peut constater à l’heure actuelle que le concept d’inclusion scolaire est encore balbutiant et que nombre de situations pourraient être qualifiées d’intégration scolaire, c’est-à-dire dépendant de l’adaptation de l’individu aux normes de la société et non l’inverse. De fait, il est fréquemment remarqué que la collaboration entre professionnels présents au sein des entités scolaires accueillant des UEE est encore trop peu développée. Il en est de même entre élèves accueillis en UEE et élèves relevant du milieu dit ordinaire.
Une réflexion collégiale à engager permettant le développement d’une culture commune
Ces constats sont à relativiser au regard de la jeunesse du déploiement et des particularités territoriales. Toutefois, seule une réflexion collégiale au sein des entités scolaires tant du 1er que du 2nd degré permettra une inflexion des points de vue et une évolution des pratiques vers la prise en considération de la diversité des besoins. La complexité de la tâche réside dans la diversité des acteurs, chacun ayant une idée plus ou moins nette de l’adaptation systémique nécessaire. Il conviendra, non seulement d’acculturer l’autre aux particularités de son activité, de son métier, mais bien de construire une troisième voie faite de briques posées une à une sur des fondations solides prenant en considération l’ensemble des attendus des institutions en présence. Tout l’enjeu réside dans cette construction faite de consensus partagés, négociés pieds à pieds, sans aucun renoncement de fonds, en laissant de côté les scories de prises de position « sectaires ». Il s’agit de faire corps, de fabriquer un milieu commun fait de la richesse des acteurs et de leurs points de vue ayant une seule et même focale : l’inclusion scolaire de diversités au sein d’une unité commune. Cela nécessite une prise de conscience de la nécessité d’œuvrer ensemble, une mise en avant des objectifs de la part des décideurs, une impulsion commune, un acte de formation pensé ensemble, mais également un accompagnement de tous les acteurs dans la durée.
Des « communs composés »
Enfin, il est important de prendre conscience du fait que la « troisième voie , que l’on se doit de construire ensemble, entre acteurs d’une même entité scolaire accueillant une unité d’enseignement externalisée, est avant tout le fruit de « communs composés » liés aux entités en présence. Il est indéniable que, lors de formations dites croisées, certains incontournables apparaitront, laissant à penser qu’il suffit d’appréhender de nouvelles notions pour faire entité commune. Il s’agit là d’un leurre car l’essentiel est ailleurs. Il se situe bien évidemment dans l’élaboration de ce que Serge Thomazet (1) appelle un inter-métier partagé, permettant de fait une mise en confiance capitalisé pour la mise en œuvre d’actions adaptées et adaptatives tout au long du parcours de vie de l’individu en fonction de ses besoins que l’on aura à cœur d’identifier tout en aidant chacun à le faire émerger.
Pierre-Jean FAVE, janvier 2023
(1)Serge Thomazet, chercheur associé au laboratoire ACTé (activité connaissance transmission éducation) de l’université Clermont-Auvergne